Le big data fait sa rentrée dans les grandes écoles
‘De HEC à Polytechnique, les principales formations commerciales et scientifiques multiplient les cursus dédiés à l’analyse des métadonnées. Une expertise de plus en plus convoitée par les recruteurs. HEC, Essec, Telecom ParisTech, et depuis cette semaine Polytechnique: depuis quelques mois, les grandes écoles multiplient les formations au « big data ». Un phénomène suivi de près par les grandes entreprises qui convoitent ces futurs experts capables de dénicher des pépites dans la jungle des mégadonnées, le « big data » en bon français.
Jonathan Bibas, 21 ans, sort de Telecom ParisTech, l’une des premières écoles d’ingénieurs à avoir lancé en septembre 2013 une formation en big data. « Je n’ai pas cherché de travail, j’ai tout de suite été contacté par plusieurs agences de recrutement », explique-t-il. Depuis deux semaines, il travaille chez Air Liquide, leader mondial des gaz industriels, comme « data scientist ». Son travail? Valoriser les données de l’entreprise en espèces sonnantes et trébuchantes, grâce à ses connaissances pointues en mathématiques et informatique. « En ce moment, je cherche à comprendre comment réduire la pollution en ville grâce au big data », confie-t-il.
« Ce sont des perles encore trop rares en France, alors que les besoins sont colossaux », indique Guy Mamou-Mani, président de Syntec numérique, premier syndicat patronal du secteur. Selon une étude du cabinet Gartner, ce nouvel écosystème devrait générer plus de 4 millions d’emplois dans le monde d’ici à 2015. Dans cette course aux données ultraconcurrentielle, la France est bien armée face aux autres puissances, assure Nicolas Glady, titulaire de la chaire big data à l’Essec, inaugurée fin 2013: « notre culture mathématique est très forte et nos écoles d’ingénieurs et de commerce sont parmi les meilleures au monde ».
Depuis plusieurs mois, elles se sont mises au diapason. L’école Polytechnique est la dernière en date, avec la création en octobre d’un master commun avec Telecom ParisTech. « Dans un monde où il y aura de plus en plus de capteurs, de plus en plus de données, il faut des experts pour extraire une information pertinente », justifie Frank Pacard, le directeur de l’enseignement et de la recherche. « Tout ce qui se passe autour du big data aujourd’hui est comparable à ce qui s’est passé avec la généralisation de l’informatique au cours des années 80-90 », analyse Nicolas Glady.
Extraire le pétrole du XXIe siècle
Surnommées « le pétrole du XXIe siècle », les données personnelles sont une mine d’or pour les entreprises. Les sociétés de commerce en ligne, pionnières dans le ciblage publicitaire à partir des traces laissées sur le web par les consommateurs, ne sont plus les seules concernées. Les assurances pourraient, par exemple, fixer les primes en fonction du comportement de leurs assurés au volant, grâce aux données fournies depuis un logiciel embarqué.
En analysant les achats récents de leurs clients, les banques pourraient leur proposer de nouveaux crédits. Les secteurs des télécoms, de la santé ou des transports sont également intéressés. L’assureur AXA dit « suivre de très près les étudiants » de ces nouvelles formations. « On pense qu’il y aura bientôt pénurie », confie Karima Silvent, responsable des ressources humaines au sein du groupe.
Une dizaine d’élèves de HEC ont ainsi intégré AXA, partenaire de l’école au sein d’une chaire big data lancée en mars. « Les data scientists sont des profils très techniques que nous cherchons à recruter », confirme BNP Paribas, engagé dans la chaire big data de Telecom ParisTech. « Mais ils sont encore peu nombreux sur le marché de l’emploi car les formations sont tout juste naissantes. »
Avant de recruter, les entreprises doivent aussi passer par une révolution interne. « Le basculement vers le big data est un changement technique et organisationnel pour une entreprise », explique Judith Trippart, consultante chez Clémentine, cabinet de recrutement spécialisé. « Pour l’instant, leurs équipes dédiées à l’analyse de données ne sont pas encore bien structurées », confirme Stéphane Clémençon, enseignant à Telecom ParisTech. « Mais les besoins qui nous remontent des entreprises sont croissants. C’est le sens de l’Histoire. » ‘
Source : lexpress.fr avec AFP