Mastères spécialisés, le grand bain mondial
‘La rude concurrence sur ce cursus initialement franco-français oblige les grandes écoles à affirmer leurs différences. Prochaine étape, l’international.
C’est un diplôme “maison” créé par l’ensemble des grandes écoles en réaction à l’ostracisme du monde universitaire, qui ne voulait pas leur accorder le privilège de la distribution des masters… La Conférence des grandes écoles est donc partie des besoins du marché de l’emploi – dictés par les entreprises – pour calibrer, mettre au point puis reconnaître un certain nombre de cursus spécialisés proposés par les business school et les écoles d’ingénieurs.
Constamment réajustés, ajoutés, supprimés en fonction des besoins. Bref, une stratégie drivée par la demande. À l’heure du bilan, ces formations courtes font plutôt des heureux : les diplômés, qui y trouvent un efficace levier d’insertion, et les entreprises, qui bénéficient de candidats spécialisés dans les domaines de recherche qui sont les leurs. Ces programmes encore très franco-français prennent le grand large pour se lancer à l’assaut du marché international, avec leurs spécificités qui font recette dans l’Hexagone. Résultat dans quelques mois.
Plus de 7 000 diplômés par an, environ 430 intitulés répartis dans 125 établissements : les mastères spécialisés (MS) des grandes écoles – formation courte, intensive, ancrée dans la vie professionnelle – séduisent. Tout comme leurs faux jumeaux, les Masters of Science (MSc, enseignés en anglais). Depuis la création du label en 1983, plus de 80 000 étudiants ont reçu un MS, dont 20 000 étrangers, selon les chiffres de la Conférence des grandes écoles (CGE). Cette formation, qui n’est pas reconnue par les instances ministérielles mais s’est construite contre l’opposition des universités à partager ce privilège, est très structurée, avec généralement 7 ou 8 mois de cours, puis 6 à 8 mois d’immersion en entreprise, le tout couronné par la soutenance d’une thèse professionnelle.
Les raisons de ce succès sont bien connues : des spécialisations constamment repensées pour coller aux besoins des entreprises, d’une part, et des niveaux d’exigence maintenus par la difficile obtention du label délivré par la Conférence des grandes écoles, d’autre part. “Dans un marché de l’emploi très dégradé pour les jeunes diplômés, une spécialisation pointue permet d’accéder à un meilleur niveau d’emploi. Logiquement, en cas de poursuite d’études, les conditions d’entrée sur le marché du travail sont bien meilleures, notamment au niveau des salaires” dit Pierre Lamblin, directeur du département Études et recherche à l’Association pour l’emploi des cadres (Apec). Nombreux sont les jeunes diplômés à opter pour un mastère spécialisé.
24 % des diplômés des grandes écoles d’ingénieurs et 18,3 % des diplômés des business schools s’inscrivent en effet en MS pour compléter leur formation. Et l’offre est foisonnante : la CGE a accrédité 32 nouveaux mastères spécialisés à la rentrée dernière, même si des fermetures de formation ont lieu dans des proportions similaires. Événementiel, environnement, fiscalité, édition, sport : il y en a pour tous les goûts et pour toutes les formations préalables.
Une offre touffue et réorganisée
Si un MS s’intègre logiquement dans un parcours après un diplôme d’ingénieur ou d’école de commerce, les étudiants aux cursus moins classiques, Sciences-Po par exemple, gagnent du terrain. Les écoles veulent diversifier leurs recrutements. “Le vivier de talents est le même mais les projets sont différents. Lors de l’entretien d’entrée, nous évaluons l’excellence académique du candidat, mais surtout son projet, qui doit être précis et ambitieux sans être trop figé. Il arrive que nous considérions qu’un MS peut ne rien apporter à un étudiant, qui sera peut-être davantage intéressé par un MBA par la suite” avance Marie-Noëlle Koebel, directrice des études à l’Essec, qui forme 500 étudiants en MS par an, répartis sur une dizaine de formations.’
Par Anne-Laurence Gollion
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Source : lenouveleconomiste.fr